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Les ânes blancs, les tortues Caretta caretta et des millions d’espèces d’oiseaux : des rencontres (im)possibles à l’Asinara – l’ex Alcatraz italienne et nouveau halo de paix pour les animaux. Voici le récit de notre immersion dans les terres de cette île italienne, située dans la région de la Sardaigne.
Repérés par des mouflons, nous dégainons nos appareils photo avant que ceux-ci ne nous échappent. Mais ni notre présence, ni nos engins ne semblent les apeurer. Imperturbables, ils restent là, devant nous. A côté, des ânes broutent sans même prêter attention à nos gestes – pourtant très maladroits… Derrière eux, des dizaines de mouettes attendent patiemment le coucher du soleil sur leur rocher de granit… Nous levons les yeux vers la mer et revenons subitement sur les ânes. Mais c’est qu’ils sont blancs !
Asini bianchi – symbole de l’île
En voilà des rencontres surprenantes et insolites à l’Asinara : ce Paradis terrestre né d’un Enfer… Durant plus d’un siècle, cette petite île au nord de la Sardaigne a été l’Alcatraz italienne. Les mafiosi les plus célèbres, comme Raffaele Cutolo et Totò Riina, ont été détenus dans les murs de cette prison qui, depuis 1997, n’est plus.
Il s’agit, aujourd’hui, d’un Parc national avec son sable blanc, ses eaux turquoises, ses roches découpées et sa faune inébranlable : un lieu de peine reconverti en Eden méditerranéen, une zone maritime protégée et reconnue par l’Europe comme “Site d’intérêt communautaire“. Mais, selon Pier Paolo Congiatu, directeur du Parc National, “le dilemme reste le suivant : Parc National ou Ex-prison ? La plupart des gens pense trouver une prison ici, mais il n’y a que des animaux en liberté. Si 100 ans d’histoire ne s’effacent pas comme cela, le futur, lui, est dans la nature, dans ces plantes préhistoriques – des dinosaures végétaux ! -, dans les colonies de mouettes et de cormorans, dans les ânes blancs, dont on ne connaît pas bien l’origine, et dans la mer aussi car, ce qu’il y a sous l’eau est peut-être plus riche que tout ce que nous pouvons voir sur terre“.
Sur la route vers Cala Reale, le guide nous indique les limites de la côte. Celle-ci se divise en dizaines de baies et de golfs pour se perdre à l’horizon, sur 110 km (alors que l’île ne fait que 50km² !). Voilà sans doute pourquoi l’île s’appelle “Asinara“, qui vient du latin Insula Sinuaria – c’est-à-dire “riche de criques”. Explication très plausible malgré, pourtant, la présence d’ânes albinos (“Asini bianchi” en italien).
A Cala Reale, nous pénétrons dans le siège de l’Observatoire de la Mer. Il s’agit d’un Centre de récupération des animaux marins – et particulièrement des Tortues Caretta caretta, une espèce très menacée dans la mer Méditerranée. Le directeur de l’Observatoire, Laura Pireddu, nous montre deux tortues de mer qui nagent dans une vasque remplie d’eau à l’intérieur du centre : « nous les avons récupérées dans le nord de la Sardaigne, elles étaient restées coincées dans les filets d’un pécheur […]. Elles auraient pu mourir noyées ».
Nous sortons sur le quai, en face de l’édifice, et découvrons une zone de la mer protégée et clôturée. « Dans cette zone de réhabilitation, la Caretta caretta reprend contact avec son environnement naturel après la période d’alimentation artificielle. Grâce aux relevés Gps et aux cameras fixées sur les carapaces des tortues, nous avons pu constater que – lors des premières 48h qui suivent leur remise en liberté – l’hyperactivité des tortues pour trouver à manger entraîne la mort des animaux. Aussi, nous les habituons, petit à petit, dans cette petite parcelle d’eau ».
L’Observatoire de la faune du Parc de l’Asinara se trouve sur la route entre Fornelli et Cala Reale. Danilo Pisu, le responsable, munit d’un anneau l’oiseau qu’il a entre ses mains afin de suivre ses mouvements et étudier son comportement « l’Asinara est survolée de millions de spécimens d’oiseaux, qui font souvent une pause sur l’île. Les petites îles de la Méditerranée sont des laboratoires à ciel ouvert. Pendant sept mois consécutifs, nous baguons une moyenne de 10 000 espèces, qui servent pour les observations ».
Avec Venanzio Cadoni, commandant de la Station Forestière de l’Asinara, nous pénétrons dans les zones humides pour repérer la faune « dès le mois d’avril, la période des amours commence pour les animaux, particulièrement pour le Tadorne, le Mallard, le Busard des roseaux, l’Échasse blanche, la Fulica et la Gallinule poule-d’eau. Ce sont des espèces qui fréquentent les zones humides, surtout dans la zone de Fornelli, S Maria et Campu Perdu. Nous pouvons y observer les faucons pèlerins près des falaises de la côte sud-ouest, Punta Salippi et Pedra bianca. Lors des vols nuptiaux, ces prédateurs donnent un aperçu de leurs qualités d’acrobate. Pendant ce temps, sur les petits îlots de Cala di Sgombro, des Gabbiani corsi (les mouettes les plus rares de la Méditerranée) commencent à se regrouper et nidifient sur l’île ».
Nous nous arrêtons devant l’étang. Les oiseaux s’envolent et nous en profitons pour prendre de magnifiques photos. Nous nous asseyons sur le sol déjà chaud « Ici, à l’Asinara il est toujours possible de rencontrer une grue, des hérons et, naturellement, quelques perdrix sardes. Et lorsque nous nous aventurons dans le bois, à Elighe Mannu, au nord de l’île, il est rare de ne pas croiser quelques flamands ou d’observer les spectaculaires descentes en piqué du faucon pêcheur ».
Infos et conseils utiles :
Le prix de la visite s’élève à 55€/j et par personne.
L’idéal, c’est d’être véhiculé : l’entreprise www.wildasinarapark.com propose des excursions guidées dans un véhicule tout-terrain (Land Rover). C’est le meilleur – voire le seul – moyen de parcourir l’île dans sa totalité (la partie nord est inaccessible autrement : trop de reliefs et une mauvaise route pour des voitures de ville).
Pour loger : le petit port de Stintino – d’où vous pourrez réserver votre excursion. Nous vous recommandons l’hotel 3* : le Park Hotel Asinara. Petit mais très confortable et chaleureux, personnel souriant et accueillant.
Nb : la piscine que vous apercevrez sur le site n’est pas celle de l’hotel mais celle du Cala reale (par contre, rien ne vous empêche d’y aller : c’est le même propriétaire) et puis, il y a la plage de Stintino !
Park Hotel Asinara : Cala Lupo, 7040 Stintino, Sardaigne, Italie
D’après l’article du Corriere Della Sera
Crédits photos : wildasinarapark.com